L’Europe s’invite au mariage des couples mixtes

L’Europe s’invite au mariage des couples mixtes
Réflexion après les rencontres notariales internationales
organisées à Lyon par le notariat français (fin 2018)

Chloé de Planchard
Etudiante en L3 droit privé – Collège de Droit
Faculté de Droit – Université Jean Moulin Lyon 3

Les citoyens européens, vivant en couple mixte, c’est-à-dire composé d’un(e) Français(e) et d’un(e) non-Français(e), au moins l’un d’eux vivant en dehors de leur État d’origine sont souvent démunis pour savoir quel est le régime juridique qui leur est applicable.

Les rencontres notariales organisées à Lyon ont réuni beaucoup de participants, notamment allemands et néerlandais, ce qui montre l’intérêt des européens pour notre système juridique dont ils se sentent à la fois ignorants et concernés. Leurs principales interrogations portent sur les régimes matrimoniaux entre la France et leur pays d’origine. Ils se demandent si les droits garantis par le contrat de mariage, que sont la stabilité et la sécurité juridique, sont protégés. Mais il a aussi été question de conflit de règles de droit : quelle règle s’applique, laquelle est la plus avantageuse…, donc des questions pertinentes que la plupart des européens se posent. Ces rencontres sont ainsi au service des familles.

Le droit de la famille est le droit qui comporte le plus d’éléments d’extranéité.

– Au niveau interne, tout d’abord : aujourd’hui, un mariage sur sept célébrés en France est mixte. Ce phénomène est en constant accroissement tout comme les problèmes juridiques qui l’accompagnent. C’est dans cette idée que, le 4 février 2010, a été signé entre l’Allemagne et la France un accord instituant un nouveau régime matrimonial : le régime optionnel de la participation aux acquêts. En effet, les mariages franco-allemands se développent de plus en plus et le régime matrimonial légal allemand, qui est celui de la participation aux acquêts, est différent de celui du droit français, le régime de la communauté réduite aux acquêts. Ainsi, le régime optionnel, même s’il se rapproche du droit allemand inclut tout de même des spécificités du droit français pour regrouper au mieux les deux droits.

– Au niveau externe : le mariage entre un(e) Français(e) et un(e) non-Français(e) à l’étranger est tout aussi compliqué. Le mariage doit être célébré par l’ambassadeur ou le consul de France. Cependant, l’autorité française n’a cette compétence que dans quatorze pays dans le monde.

Une évolution sur les régimes matrimoniaux a été entreprise le 24 juin 2016 avec l’adoption de nouveaux règlements européens. Désormais, le choix de la loi applicable à un régime matrimonial peut se faire entre la loi de l’État de résidence habituelle de l’un des futurs époux, et la loi nationale de l’autre. Toutefois, malgré cela, il reste de nombreuses incertitudes. C’est pourquoi Pierre Tarrade, notaire et rapporteur général du congrès des notaires de France, Famille et Patrimoine à l’international, le notariat face aux enjeux de la mobilité internationale, qui a eu lieu à Bruxelles en juin dernier, soutient la nécessité d’adopter un code de droit international privé français afin de remédier aux conflits de lois et de juridictions. Il rappelle que « la France est un des derniers systèmes de droit moderne à n’avoir toujours pas adopté une telle codification ».

L’Europe doit permettre aux citoyens de choisir sans contrainte son lieu de résidence et son système juridique. On pense au poème de Charles Baudelaire L’invitation au voyage :

« Mon enfant, ma sœur
Songe à la douceur
D’aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble ! »

Robert Schumann, père fondateur de l’Europe avec Jean Monnet, a, dans sa sagesse et sa créativité, bien défini la démarche innovatrice de l’Europe : « l’Europe se cherche. Elle sait qu’elle a entre ses mains son propre avenir. Jamais elle n’a été si près du but. Qu’elle ne laisse pas passer l’heure de son destin, l’unique chance de son salut. »

Septembre 2019

Voyage à Bruxelles pour juristes lyonnais en herbe

Clovis Chaverot
Etudiant en L3 – Secrétaire de l’association du Collège de Droit
Faculté de Droit – Université Jean Moulin Lyon 3

Du 23 au 25 mai 2019, 70 étudiants du Collège de droit, toutes promotions confondues, ont participé au voyage à Bruxelles organisé par son association.

Le jeudi 23 mai, nous sommes partis de Lyon Part-Dieu à 6 h pour arriver à la gare de Bruxelles Midi à 10 h. Nous avons immédiatement reçu un chaleureux accueil lorsqu’il a fallu commander les titres de transports. La longue attente et cette première approche avec les guichetiers belges nous ont alors appris que la bonne humeur qui règne dans ce pays n’est pas une légende.

Après cela, nous nous sommes dirigés vers l’auberge de jeunesse « Hello Hostel », sans s’y attarder, pour prendre ensuite la direction du Conseil de l’Union européenne où nous avons été accueillis à 13 h 30. La visite a pris la forme d’une présentation de l’institution. Un fonctionnaire nous a expliqué le fonctionnement du Conseil avant de parler de son métier et de son rôle dans la négociation et l’adoption des directives. Cette conférence nous a permis de comprendre les dessous des négociations entre Etats, et de réaliser que la théorie ne correspond pas toujours à la réalité. En effet, certains fonctionnaires dont nous ignorions même l’existence jouent un rôle important dans l’adoption des directives européennes, dans l’ombre de leur ministère respectif.

Les étudiants ont ensuite pu découvrir la ville et toutes les merveilles qu’elle avait à offrir. Avant tout, il a fallu goûter les célèbres moules frites sous ses nombreuses formes. Pour conclure la soirée, de nombreux étudiants et étudiantes se sont rejoints autour d’une bière, autre spécialité locale.

Le lendemain, vendredi 24 mai, nous étions attendus au Parlement européen à 9 h 30 également pour une présentation de l’institution. Cette fois ci, nous avons été accueillis par un responsable de la Direction générale de la communication du Parlement qui nous a parlé des différents députés français qui siègent au Parlement européen et de l’importance des élections du 26 mai. Très ouvert d’esprit, il a vanté l’investissement et le mérite des élus français à l’exception de certains. D’origine française, il a affirmé avoir honte qu’un pays comme le nôtre puisse élire autant de personnes pour qu’elles soient si peu présentes au Parlement européen. En outre, il nous a également appris que la présence de l’UE dans les médias français n’était pas assez importante en comparaison à l’Allemagne ou même la Belgique. Il a passé ainsi une heure et demie à nous peindre un portrait peu flatteur de la France sur la scène européenne : un mal être général s’est installé dans notre groupe d’étudiants français.

Un court temps nous a été accordé pour la pause déjeuner étant donné que le rendez-vous à la Commission européenne était fixé à 14 h. Ici nous avons pu assister à deux conférences données par deux professionnels. Premièrement, un analyste des données économiques nous a présenté la Commission européenne en l’assimilant à l’exécutif politique de l’UE. Cette première conférence interactive a réellement suscité l’intérêt des trois promotions de notre groupe (L1, L2, L3) tant le dialogue était ouvert et le sujet intéressant.

Ensuite, une gestionnaire des politiques a traité de la citoyenneté européenne. Cela a pris la forme d’un cours magistral, où la discussion était peu ouverte, et assez rébarbatif pour les étudiants de L3 qui avaient déjà tous suivi un cours de libertés de l’UE. Les étudiants de L1 et L2 également ne semblaient pas aussi vifs que sur le premier sujet.

Pour conclure sur la visite des institutions, nous pensions, à tort,  recevoir un récit historique comme lorsque nous avons visité les institutions français à Paris : or, compte tenu de la jeunesse des institutions européennes, on nous a surtout présenté leur fonctionnement.

Le samedi 25 mai, aucune visite n’était prévue concernant les institutions. Cependant, l’association du Collège de droit avait pris en charge les visites des musées de la ville de Bruxelles et du chocolat. Plusieurs d’entre nous ont donc pu participer à ces visites et en apprendre plus sur l’histoire de la ville et ses spécialités. La visite du musée du chocolat a été une vraie révélation pour les amateurs de chocolats tant les secrets que le chocolat et le cacao avaient à nous révéler étaient nombreux.

Pour les étudiants qui sont allés visiter le musée de la ville de Bruxelles, il était possible d’en apprendre plus sur l’histoire du symbole de la Belgique : « le Manneken Pis ». Nous nous sommes également rendu compte que la Belgique est un jeune pays, à l’image de sa capitale. Une fois tous ces musées arpentés et visités, le temps du retour a sonné et à 16h, nous avons dû nous rendre à la Gare de Bruxelles Midi pour prendre notre train. Le voyage de retour a été l’occasion pour une bonne partie des étudiants de récupérer de ce séjour court mais intense.

Arrivés en gare de Lyon Part-Dieu, nous nous sommes lancé un ultime au revoir avant que chacun ne parte de son côté, mais avec la ferme intention de visiter d’autres villes européennes pour mieux comprendre l’Europe et sa diversité.

1er juillet 2019

 

La concurrence fiscale au sein de l’UE

La concurrence fiscale au sein de l’Union européenne :
une incitation à l’adaptation de l’impôt sur les sociétés français

 Morgane Fauchon
Etudiante en L3 Droit privé – Collège de Droit
Faculté de droit – Université Jean Moulin Lyon 3

Au sein de l’Union européenne, la politique fiscale est une compétence appartenant principalement aux États membres. Elle permet largement aux pays de mener les politiques économiques et sociales correspondant aux situations auxquelles ils sont confrontés.

Il faut préciser que les traités originaires instituant une union à l’échelle européenne ont posé quatre libertés de circulation à l’origine politique. De fait, Robert Schumann énonce qu’il faut lancer un processus irréversible d’intégration économique pour atteindre « une union sans cesse plus étroite entre les peuples ». Néanmoins, pour arriver à une paix s’étendant sur le territoire européen, il était nécessaire de dépasser une simple coopération diplomatique.

Cette union se réalise alors progressivement, au gré des événements institutionnels, notamment grâce à l’adoption d’actes dérivés par les institutions de l’Union européenne visant à rapprocher les règles économiques et fiscales des Etats membres. En effet, les disparités existantes dans ces domaines sont de nature à porter atteinte au bon fonctionnement du marché intérieur et à entraver directement l’exercice des libertés économiques de circulation.

S’agissant de la fiscalité directe, l’Union européenne est également habilitée à légiférer lorsque les libertés de circulation du marché unique sont menacées.

Il apparaît cependant qu’une telle harmonisation pourrait devenir nécessaire en ce que la concurrence fiscale au niveau commercial prend de plus en plus d’ampleur à l’échelle européenne dans un premier temps, mais qui apparaît également à l’échelle mondiale.

De fait, l’impôt sur les sociétés (IS) en France a l’un des taux les plus élevés de l’Union européenne. De 1993 à 2018, le taux normal de l’impôt sur les sociétés en France était établi à 33,1/3%. Si à l’époque de son adoption, ce taux était conforme à la moyenne européenne, ce n’est plus le cas aujourd’hui. En effet, d’après Le Figaro, suite la crise de 2008 on constate que la moyenne européenne du taux de l’impôt sur les sociétés a baissé de presque 10 points de 32 % en 2010 à 23% en 2016.

En outre, malgré le fait que le taux de l’IS français soit l’un des plus élevés de l’Union européenne, force est de constater que son rendement est de loin inférieur à celui de ses voisins européens. Selon un rapport de l’Observatoire français des conjonctures économiques datant de 2018, il convient alors de retenir qu’au niveau national la part de l’impôt sur les sociétés dans le PIB français a baissé.
De ces constats résulte la nécessité pour la France de s’adapter à son environnement économique. En effet le Conseil des prélèvement obligatoires (CPO) indiquait le 12 janvier 2017 dans son rapport « Adapter l’impôt sur les sociétés à une économie ouverte » qu’une harmonisation de l’assiette entraînerait une concurrence plus accrue des taux. Un taux trop élevé serait par conséquent encore moins attractif qu’il ne l’est déjà.

Un premier mouvement de réforme a donc été prévu en France par la loi de finances pour 2017 en prévoyant une baisse progressive du taux de l’impôt sur les sociétés pour atteindre 28% en 2020. Toutefois cette trajectoire a été modifiée en 2018, en suivant certaines indications contenues dans le rapport de 2017 (précité) du CPO. La loi de finance pour 2018 a ainsi institué un calendrier de baisse progressive du taux de l’impôt sur les sociétés.

L’objectif de cette réforme est d’abaisser progressivement le taux normal de l’impôt sur les sociétés à 25% pour se rapprocher de la moyenne européenne.

Une telle baisse pose des questions quant à son impact économique. En effet, d’après de nombreuses études cette baisse se traduirait par une baisse de recette pour l’État d’1,4 milliards d’euros soit une perte de recette d’environ 10 milliards d’euros. A contrario, elle serait financée à court terme pour au moins 1/3, par la hausse attendue d’activité et de rentabilité des entreprises. Ce qui par la suite implique une hausse des investissements, de la productivité et de la croissance.

Toutefois, ces effets si positifs d’une baisse l’IS prévus par des tentatives de modélisation doivent comporter certaines limites. La plupart des études ne prennent pas en compte l’impact des augmentations des investissements directs étrangers.

Il ne faut pas non plus omettre qu’une baisse de l’impôt des sociétés dans un pays a souvent pour effet d’entraîner une réaction de la part des pays voisins. Cependant, la France étant parmi les derniers dans l’Union européenne à entamer cette réforme nécessaire, il est plutôt possible d’affirmer que c’est elle qui met en place cette réforme en réaction aux baisses de ses voisins et que d’autres leviers peuvent permettre de financer cette perte de recettes à commencer par la réduction des dépenses fiscales.

De ce fait, la réforme de l’impôt sur les sociétés paraît nécessaire d’un point de vue national, mais encore plus au niveau européen, pour que la France redevienne compétitive et attractive.

Il se trouve, en effet, que sous l’impulsion de l’Union européenne et de la mise en place du marché commun, la problématique des planifications fiscales agressives, que l’on qualifie aussi de dumping fiscal, s’est développée entre les États membres  car les sociétés s’implantent au sein du marché commun de l’Union européenne, comprenant 28 systèmes fiscaux différents. Cette hétérogénéité des régimes d’impôt sur les sociétés mène inévitablement au développement d’une concurrence fiscale européenne.

Les États membres de l’Union européenne ont donc progressivement réduit leur taux d’impôt sur les sociétés pour protéger leurs assiettes fiscales et attirer les investissements étrangers.

Néanmoins, ces pratiques fiscales agressives entre les pays se heurtent au principe européen établi pour le bon fonctionnement du marché commun d’une concurrence libre, loyale et non faussée entre les États membres.

Ainsi, l’Union européenne a-t-elle pu mettre en place certaines solutions pour réguler la concurrence fiscale européenne en matière d’impôt sur les sociétés. Il faut notamment mentionner le projet ACCIS développé dans l’article de Thomas NONN « Difficultés tenant à l’harmonisation de la fiscalité des entreprises dans l’Union européenne » de janvier 2019 (publié sur le présent site).

La mise en place de l’ACCIS aura des effets sur les mesures d’intégration fiscale, qui sont apparues au sein de l’Union européenne pour favoriser les groupes de sociétés. En effet, ce mécanisme permet au groupe de sociétés de présenter un bénéfice consolidé, qui est alors imposé dans le pays où se trouve la société mère.

Ces régimes, bien que favorisant la multiplication des échanges au sein du marché commun de l’Union européenne, contribuent aussi à la concurrence fiscale qui existe entre les Etats membres de l’UE. Les pays souhaitent attirer les sociétés mères et les imposer dans leur pays. Or, les différences entre les régimes nationaux d’impôt des sociétés au sein de l’Union européenne, créent des conditions propices à ce que les entreprises transnationales transfèrent leurs bénéfices dans les pays à régime fiscal dits “préférentiels”.

Aussi, dans l’objectif de lutter contre les paradis fiscaux qui permettent aux entreprises d’échapper à l’IS, il incombe d’ici fin 2019, au “groupe de bonne conduite” institué par l’Union européenne d’établir une liste noire des paradis fiscaux présents à l’échelle globale.

A ce sujet, il convient de se référer à l’avis confié en 2016 au magazine Edition législatives par Pascal Saint-Amans, le directeur du centre de politique et d’administration fiscale de l’OCDE. Ce dernier entend, de fait, “redessiner l’architecture de la fiscalité internationale” et ce faisant prévenir les multinationales de commettre des abus. Ainsi, les multinationales ne pourront pas échapper à l’IS dans les pays où elles réalisent leurs activités économiques en fuyant dans les paradis fiscaux.

Le centre de politique et d’administration fiscales de l’OCDE a notamment imposé aux Etats membres de l’OCDE plus de transparence. Le centre dénonce de cette manière les accords fiscaux opaques et secrets signés par certains Etats avec de grandes compagnies. Cette exigence vise effectivement à mettre en place une concurrence fiscale en matière d’impôt sur les sociétés “plus claire, mais aussi plus frontale”.

Cette liste assurera donc aux États membres de l’Union européenne se soumettant pleinement à l’instauration d’une assiette commune en matière d’impôt sur les sociétés, le respect de cette assiette par le reste des États. Les pays inscrits sur cette liste noire se verront refuser l’accès aux financements de l’Union européenne, les poussant ainsi à imposer les bénéfices des sociétés afin de bénéficier de nouveau desdits financements. Dès lors, l’ensemble des États membres se placera dans le cadre d’une concurrence loyale. La France profitera notamment de cette mesure par le rétablissement d’un certain équilibre après la baisse imposée de son taux d’imposition en matière d’impôt sur les sociétés.

juin 2019

Européennes 2019 : en direct d’un bureau de vote – Paroles d’assesseur

Européennes 2019 : en direct d’un bureau de vote
Paroles d’assesseur

Fanny Lheureux
Etudiante en L3 Droit privé – Collège de Droit
Faculté de droit – Université Jean Moulin Lyon 3


En tant que juriste, nous savons qu’un droit n’est effectif que lorsque les conditions matérielles à sa réalisation sont réunies. Il en va ainsi du droit de vote. La première condition à son exercice est la présence d’un bureau de vote et de citoyens pour le faire
fonctionner.

Pas de Droit de vote sans un bureau de vote
Or, chaque élection voit resurgir le problème du manque d’assesseurs dans les bureaux de vote. Cette pénurie est suffisamment récurrente pour que l’Etat français ait procédé à plusieurs mesures de simplification en matière électorale par le décret n°2006-1244 du 11 octobre 2006, et notamment sur la composition du bureau de vote qui ne doit désormais plus comporter, outre le président et le secrétaire, qu’au moins deux assesseurs et non plus quatre, et le bureau peut fonctionner valablement au cours de la journée si deux de ses membres sont présents et non plus trois.

Pourtant, de nombreuses communes continuent de se plaindre du manque d’assesseurs. Les assesseurs sont ordinairement désignés par les partis politiques des candidats mais comme il est difficile de désigner un assesseur dans chaque bureau, chaque citoyen inscrit sur les listes électorales peut être assesseur dans sa commune.

On imagine que le problème se pose particulièrement en zone rurale, or il est encore plus prégnant en ville. Après une première expérience d’assesseur pour les élections présidentielles et législatives de 2017 dans mon ancien village de résidence et après avoir vu une publication de la mairie de Lyon sur les réseaux sociaux, j’ai fait la démarche de postuler pour être assesseur bénévole pour les élections européennes du 26 mai 2019. Après avoir rempli un formulaire en ligne, j’ai été convoquée à l’Hôtel de Ville de Lyon à une réunion de préparation, puis à la mairie du 8ème, arrondissement de mon domicile, pour y recevoir mon affectation. Nous étions 700 assesseurs bénévoles recensés pour la Ville de Lyon, chiffre insuffisant pour couvrir les besoins selon les arrondissements.
C’est ainsi qu’alors que pour ma première fonction d’assesseur en zone rurale, je n’avais été mobilisée que sur une tranche horaire de 2 heures, le 26 mai je réalise une journée marathon de 13h ponctuée par une seule petite heure de pause déjeuner, arrivée à 7h45, tenue du scrutin de 8h à 20h, dépouillement jusqu’à 21h. La situation est encore plus critique pour le bureau voisin où il n’y a qu’un assesseur et qui va devoir demander des volontaires parmi les électeurs qui se présentent pour voter.

Répertoire électoral unique (REU) et conséquences
Lors de la réunion de préparation à l’Hôtel de Ville, les assesseurs bénévoles sont informés de leur rôle et du cadre législatif. Notre attention a été attirée sur la nouveauté du scrutin des européennes, du fait de la mise en place du REU, le Répertoire électoral unique, géré par l’INSEE. L’INSEE n’étant pas l’Etat Civil, nous avons été prévenus de la présence possible de petites erreurs comme, par exemple, des coquilles dans les dates de naissance. Auparavant, le répertoire électoral était géré par les mairies. Lorsqu’une personne déménage, elle doit s’inscrire sur les listes électorales de son nouveau domicile. Avant le REU, ce n’est qu’à ce moment là que l’information était répercutée d’où des erreurs de personnes n’effectuant pas la démarche et continuant de voter dans leur ancien bureau de vote ou de double inscription en cas de mauvaise communication. Avec le REU, tout citoyen qui déménage est automatiquement radié de son ancienne liste électorale et doit faire la démarche de se réinscrire. La problématique du REU s’est donc finalement posée autrement.
Nul n’est censé ignorer la loi dit on mais plusieurs personnes qui avaient déménagé il y a plusieurs années et qui continuaient de voter dans le bureau où j’officiais, ont eu la surprise de découvrir qu’elles avaient été radiées. La loi prévoit que le citoyen puisse se rendre au Tribunal de Grande Instance pour obtenir un jugement de réinscription sur la liste électorale, mais encore faut il que ce soit dans le cadre d’une radiation abusive. De fait, aucun des électeurs de mon bureau n’a fait cette démarche et une trentaine n’ont pas pu exercer leur droit de vote. Nous avons eu la situation cocasse d’un couple ayant déménagé en même temps pour lequel Monsieur avait été radié mais pas Madame. Nous avons aussi eu la situation difficile d’un homme âgé avec des problèmes de mobilité qui avait péniblement atteint le bureau en s’aidant d’une canne et à qui nous avons dû refuser le vote. Ce problème avec le REU a été national.

Au plus près des français
Etre assesseur dans un bureau de vote, c’est être au plus près des français. Les problématiques sociétales s’y retrouvent.
Lors de mes précédents engagements en zone rurale, j’avais finalement officié dans un milieu plutôt dit privilégié. Dans le 8ème arrondissement de Lyon, la situation est plus contrastée. D’ailleurs, le bureau où j’étais assesseur est traditionnellement un de ceux de Lyon qui ont le plus faible taux de participation. L’absentéisme avait été annoncé grand vainqueur de ces élections européennes et finalement le taux de participation de 50,2% a été une surprise. Dans notre bureau, le taux a été de 25% mais comme il était égal à celui de l’élection présidentielle de 2017, proportionnellement, il reflète la mobilisation observée nationalement.
Comme au niveau national, la liste RN est arrivée en tête. La liste de la FI est seconde suivi par LREM au coude à coude avec Europe Ecologie les Verts.

La présidente du bureau est une habituée de la fonction et connait bien les habitants. C’était rassurant de ressentir qu’il reste du lien social.

Plus dure humainement a été ma confrontation avec l’illettrisme. Difficile de rester impuissant face à une personne d’âge moyen qui fait la démarche citoyenne de venir jusqu’au bureau de vote et qui, de toute évidence, n’arrive pas à déchiffrer les bulletins et à comprendre à quels partis ou idées politiques ils se rattachent. A plusieurs reprises, des électeurs nous ont demandé des indications mais en vertu du secret du suffrage, nous n’avions pas le droit de répondre.

Ce 26 mai 2019 fut pour moi une journée très positive, épuisante mais passionnante et enrichissante.
Je suis fière par cet engagement citoyen d’avoir été un des maillons qui contribuent à faire vivre la démocratie dans mon pays et d’avoir prouvé que les jeunes savent s’impliquer.

La semaine dernière, j’ai entendu un humoriste comparer ces élections européennes à l’Assemblée Générale annuelle des copropriétaires. Cette AG où on va souvent en traînant les pieds, où il est parfois difficile d’atteindre le quorum, où il y a le voisin qui veut toujours faire des travaux mais jamais payer, le voisin qui ne veut jamais rien faire, les voisins qui s’écharpent avec le syndic, le voisin avec qui le dialogue est constructif, mais cette AG sans laquelle, aucun fonctionnement de l’immeuble n’est possible.

Juin 2019

 

Quelle gouvernance économique en zone euro?

Quelle gouvernance économique en zone euro ?
Synthèse et propositions suite à une intervention au sein du Collège de Droit

Syriane Le Dantec et Elsa Meyer
Etudiantes en L3 Droit privé –Collège de Droit
Faculté de droit – Université Jean Moulin Lyon 3

 Au sein du Collège de droit en troisième année de licence, nous avons eu une conférence intitulée « Quelle gouvernance économique en zone euro ? » par Charlotte Le Chapelain, maître de conférences en sciences économiques. Cette intervention a été pour beaucoup l’occasion de renforcer voire de découvrir l’influence et les limites des politiques monétaire et budgétaire notamment suite à la crise de 2008. Bien que le propos fût à visée économique, il a été l’occasion de débattre sur des questions d’actualité notamment face aux critiques politiques de la zone euro et son défaut de transparence et de démocratie. 

La conciliation des politiques monétaire et budgétaire s’est trouvée fragilisée suite à l’adoption du Traité de Maastricht en 1992. Dès lors, la politique monétaire a été intégrée parmi les compétences de l’Union européenne. Les Etats ont ainsi abandonné leur souveraineté monétaire et ne peuvent plus, par la même, user de leur monnaie pour combattre différentes crises par l’inflation, l’augmentation ou la diminution des taux de change. Le pouvoir monétaire a été transféré à la Banque centrale européenne (BCE) au sein de la zone euro. La politique budgétaire quant à elle reste une prérogative des Etats membres.

Néanmoins, les Etats ne sont pas totalement maîtres de leur politique budgétaire puisqu’ils doivent respecter les règles de disciplines budgétaires issues du Traité de Maastricht et du Pacte de stabilité et de croissance de 1997. Ces critères de convergence impliquent que les Etats ne doivent pas avoir de déficit public supérieur à 3% du PIB ni de dette publique supérieure à 60% du PIB. Il est intéressant de noter que la justification de ces taux demeure floue, ils ont été mal acceptés. Ces règles empêchent également une politique de relance keynésienne et entrainent des risques d’austérité en cas de crise. En 2013 le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance a instauré une règle d’or budgétaire à valeur constitutionnelle. Cette règle considère que le budget est équilibré si le déficit primaire structurel de l’Etat membre ne dépasse pas -0,5% du PIB lorsque la dette publique excède 60% du PIB. Notons par ailleurs que cette approche des politiques budgétaire et monétaire fonde ce qu’on appelle la doctrine de l’ordo-libéralisme au sein de l’Union européenne. 

Le Conseil d’analyse économique (CAE) a rendu en septembre 2018 une note dans laquelle est développée l’idée que les règles budgétaires ne doivent pas être établies par une formule mathématique sans analyse économique appropriée. D’autant plus que ces règles sont devenues très complexes rendant le cadre budgétaire difficile à intégrer pour les décideurs favorisant in fine leur non-respect. Le CAE recommande ainsi l’introduction d’une règle budgétaire basée sur le taux de croissance des dépenses publiques. Le CAE souhaite la règle suivante : « les dépenses nominales ne devraient pas croître plus rapidement que le PIB potentiel à long terme et plus lentement dans les pays où la dette est excessive. » Finalement l’intégration de cette règle semble plus justifiée et plus cohérente et pourrait même favoriser la démocratie. 

En effet, il semble normal qu’un Etat en période de croissance et de conjoncture favorable soutienne l’économie tout en vérifiant à ne pas laisser courir les déficits. En revanche, l’austérité ne doit pas être toujours la réponse pendant les crises puisqu’elle aggrave les conséquences sociales et politiques. Certaines politiques de relance sont le plus souvent nécessaires afin de relancer l’économie par l’investissement, la consommation, l’augmentation du pouvoir d’achat. Par ailleurs, notre monde est aujourd’hui affecté par de nouveaux défis qui impliquent une réponse urgente. La lutte contre le réchauffement climatique et la politique environnementale nécessitent le bouleversement de certains secteurs économiques ainsi que des investissements. Il semble essentiel pour un Etat de permettre ces dépenses publiques afin de favoriser l’environnement. De plus, l’établissement de cette nouvelle règle, n’étant pas stricte implique un dialogue entre les Etats et la Commission européenne et, dans le même temps, entre l’Etat et leurs citoyens. En effet, les Etats en établissant leur budget ne pourront plus nécessairement justifier leur politique d’austérité par l’obligation de respecter des règles européennes et utiliser l’Union comme bouc-émissaire mais, au contraire, ils devront justifier leurs dépenses en raison de ce que veulent leurs citoyens, ce qui permettrait de favoriser les relations entre l’Union et les citoyens. 

Ensuite, la crise de 2008 a également montré les limites de la BCE dont l’objectif principal est de réduire l’inflation. L’article 123 TFUE (Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne) lui interdit de financer directement un Etat membre, elle ne peut donc pas monétiser un déficit public ce qui a pour risque de priver les Etats membres de marges de manœuvres en cas de crise. Puisque les Etats ne pouvaient se financer auprès de la BCE et que l’augmentation des impôts aurait mal été supportée politiquement, il ne restait plus que la possibilité d’emprunter. Mais le risque de faillite inquiète les investisseurs et a conduit à la crise des dettes souveraines par l’envolée des taux d’intérêt directeur. 

Cette réalité pose la question de la vulnérabilité de notre dette et de l’impact des marchés financiers, souvent étrangers, sur nos politiques et les citoyens. Notre dette est détenue majoritairement à l’étranger. Les investisseurs se fient aux agences de notation pour évaluer de manière non transparente et non démocratique la solvabilité de l’Etat. Face à leur perte de confiance évaluée sur des mécanismes comptables et informatique, l’Etat est contraint de réagir par l’austérité n’ayant pas d’autres réponses.

C’est alors que l’Union a joué un rôle de caution pour rétablir la confiance. La BCE a réagi en diminuant les taux d’intérêt, ils sont à 0% depuis 2016 et Mario Draghi (le Président de la BCE) a récemment annoncé qu’ils n’augmenteront pas avant 2020. Mais c’est surtout en outrepassant ses mandats que la BCE va soutenir les Etats menacés de faillite. En effet, dès 2010 elle va directement monétiser la dette par un programme de rachat des titres de dette publique sur les marchés obligatoires secondaires. En 2012 un second programme de rachat est annoncé pour un montant illimité, la simple énonciation de ce programme a suffi pour arrêter la spéculation sur les marchés. En 2015 et 2016, la BCE a utilisé l’instrument quantitative easing en rachetant des obligations souveraines et des titres privés tout en inondant les banques de liquidités (60 milliards puis 80 milliards d’euros) afin de relancer l’économie.

Des mécanismes de solidarité ont été développés afin de soutenir les Etats et d’enrayer la spirale de spéculation des marchés financiers ; alors même que le Traité de Maastricht interdit la solidarité. Ainsi, le Fonds Européen de Stabilité Financière, le Mécanisme Européen de Stabilité Financière puis le Mécanisme Européen de Stabilité ont été créés dans l’urgence afin de permettre à certains Etats comme l’Irlande, le Portugal et la Grèce de se financer à des taux d’intérêt raisonnables. Ces fonds sont alimentés en fonction des richesses des Etats membres, ainsi, l’Allemagne et la France sont les plus gros contributeurs.

Le fait que la Banque centrale européenne ait dû outrepasser ses mandats est significatif des limites du modèle de l’ordo-libéralisme en cas de crise économique. Ces limites sont aussi présentes concernant la politique budgétaire et l’exigence du respect des critères de discipline budgétaire en cas de crise. En effet, cette exigence a pour conséquences qu’en cas de dépassement du déficit public autorisé en vertu de ces critères, et sous peine d’être sanctionné par l’Union européenne, l’Etat ne peut répondre que par une politique d’austérité, comme on le voit actuellement en Grèce. C’est dans ce type d’hypothèses que l’on voit véritablement l’impact direct de la politique budgétaire sur la société et sur les citoyens européens. Se pose alors nécessairement la question de l’adhésion de ces citoyens à ces politiques décidées au niveau de l’Union européenne.

S’interroger sur la vision qu’ont les citoyens des institutions européennes et de leurs politiques amène à la question de la légitimité de ces institutions aux yeux des citoyens. En effet, on peut relever ici l’une des critiques majeures faites à l’Union européenne et au fonctionnement de ses institutions : le manque de légitimité démocratique. C’est le cas notamment de la Banque centrale européenne, caractérisée justement par son indépendance. Pourtant, comme nous l’avons vu, certaines politiques adoptées par l’Union européenne, telles que la politique budgétaire, ont un impact réel sur les sociétés. Aussi, cette ambivalence entre d’un côté des politiques fortes adoptées, et de l’autre un sentiment de non-participation des citoyens à ces projets, peut expliquer en partie le rejet de plus en plus fort de l’Union européenne. Et c’est actuellement l’un des défis auquel doit se confronter l’Union européenne, à savoir comment intégrer davantage les citoyens dans le processus décisionnel.

Ce sentiment de déficit démocratique a pu avoir comme conséquences pour les citoyens d’envisager différemment leur rapport à la Nation, et à la souveraineté étatique. Cela a notamment pour effet la montée des nationalismes et des mouvements populistes en Europe récemment. En effet, actuellement, il y a un véritable questionnement sur le rôle et les pouvoirs de l’Etat, et sur la marge de manœuvre dont il dispose pour agir politiquement, au sein de l’Union européenne. A ce titre, la gouvernance économique de l’Union européenne, et notamment la politique budgétaire, soulèvent des questions intéressantes : doit-on laisser l’Etat maître de sa politique budgétaire, afin qu’il puisse l’ajuster aux circonstances nationales? Doit-on au contraire restreindre les marges de manœuvre des Etats dans le but d’une harmonisation européenne ? L’harmonisation européenne n’est-elle réalisable que par le modèle de l’ordo-libéralisme ? Il faut bien comprendre que l’ordolibéralisme est un parti pris de la part de l’Union européenne, ayant ses avantages et inconvénients, et qui témoigne d’une certaine vision de l’Europe et des Etats qui en sont membres. Ainsi, penser la gouvernance économique de l’Union européenne revient à définir une certaine Europe.

Or, on voit aujourd’hui de nouvelles alternatives émerger et proposer une nouvelle vision de l’Europe. Différentes propositions ont pu émerger notamment le système des Eurobonds qui permettrait d’emprunter à un taux d’intérêt unique au niveau européen pour les 19 Etats de la zone euro. Mais cette proposition a été rejetée car jugée trop fédéraliste. On retrouve encore la création d’un Parlement de la zone euro et d’un budget de la zone euro. Cette solution pourrait pallier le déficit démocratique de la zone euro et faire face aux critiques de complexité et de technocratie bruxelloise. Ainsi, le Parlement déciderait du budget de la zone euro, pourrait entraîner une harmonisation fiscale et sociale et conduire à l’objectif de taux unique d’impôt sur les sociétés. Les décisions proviendraient de la représentation nationale et non uniquement des chefs de gouvernement et de ministres des Finances. Cette impulsion démocratique ne peut être que saluée.

Finalement trois visions peuvent se dégager, certains proposent, comme par exemple le parti La République En Marche, une plus grande intégration européenne, s’approchant davantage du modèle fédéral. A l’inverse, d’autres revendiquent une plus grande souveraineté étatique, accompagnée d’une attitude plus protectionniste. Une autre voie, médiane, consisterait à conserver le modèle de l’ordo-libéralisme, tout en le rendant plus souple, et en permettant aux Etats de ne pas avoir à respecter les critères de convergence dans certaines circonstances.
Toutefois, quelle que soit la voie choisie, la gouvernance économique de l’Union européenne sera un véritable enjeu dans la définition d’une nouvelle Europe.

Mai 2019

La montée du scepticisme vis-à-vis de l’Europe

La montée du scepticisme vis-à-vis de l’Europe

Florence Picot
Etudiante en L3 Droit et science politique
Collège de droit
Faculté de droit – Université Jean Moulin Lyon 3

Depuis quelques temps, on peut observer une montée du nationalisme, de l’individualisme et des extrêmes à travers les résultats aux différentes élections. On note, par exemple, la présence de l’extrême droite au second tour des élections présidentielles en Autriche et en France, la montée du parti d’extrême droite allemand AFD au Bundestag, ou encore la présence de coalitions avec l’extrême droite en Autriche ou en Bulgarie.

D’autre part, le Brexit, en mettant en œuvre l’article 50 du TUE, montre de manière concrète qu’il est possible de se retirer de l’Union.

A cela s’ajoute le manque de connaissance que les citoyens ont du fonctionnement de l’Union européenne. Ainsi, les décisions de l’Union peuvent apparaître contraires aux intérêts nationaux mais cela n’est pas une critique de l’Union puisque celle-ci a pour mission de défendre les intérêts de l’Union et non pas les intérêts nationaux.

Enfin, l’Union peut paraître impuissante et inefficace de par le nombre d’États membres. En effet, prendre une décision à 28 (et demain à 27) est un processus plus long et plus complexe que seul ou à deux.

Pour pallier ces difficultés, il faudrait que les médias notamment parlent de l’Union de manière différente en mettant l’accent sur tous ses points positifs.

De plus, il faudrait faire (re) naître un sentiment d’appartenance à l’Union. Des solutions existent déjà en ce sens, comme par exemple l’hymne européen, la devise de l’Union européenne “Unis dans la diversité” ou encore la journée de l’Europe. Il faut donc continuer en ce sens pour promouvoir les valeurs de l’Europe et lui redonner un aspect positif dans l’esprit de ses citoyens.

Cela passe aussi par la sensibilisation des populations par des campagnes d’information, par l’éducation et par des voyages scolaires dans les institutions de l’Union. Par exemple, organiser de tels voyages à Bruxelles ou à Strasbourg, couplés à des explications simples adaptées aux enfants, donnera un aspect concret à l’Union aux yeux de ces écoliers.

Enfin, la solution est aussi, peut-être, de réformer le fonctionnement même de l’Union européenne pour le rendre plus simple, plus accessible et plus compréhensible aux yeux de ses citoyens.

25 mai 2019

Union européenne et Médias

Yassine Chattout, Mathieu Rouy, Marie Tillmann
Doctorants en droit européen
Equipe de droit international, européen et comparé – EDIEC

Université Jean Moulin Lyon 3

Dès 2000, Nicolas Moussis posait la question de savoir si l’Union européenne (UE) n’était pas confrontée à un déficit d’information plutôt qu’à un déficit démocratique (v. Nicolas Moussis, « La construction européenne et le citoyen : déficit démocratique ou déficit d’information ? », Revue du Marché commun de l’Union européenne (RMCUE), 2000, p. 153). Si l’Union européenne est souvent critiquée pour son manque de démocratie, force est de constater que les élections européennes, seul grand évènement démocratique de la vie institutionnelle européenne, sont marquées par une faible participation. En effet, lors des élections européennes de 2014, le taux de participation s’élevait à 42,61% (taux en constante baisse depuis 1979 et les premières élections réalisées au suffrage universel direct ; v. site du Parlement européen : http://www.europarl.europa.eu/elections2014-results/fr/turnout.html). Ainsi, « d’année en année, de mandature en mandature, les élections européennes mobilisent peu. La politisation recherchée des débats n’a pas atteint ses objectifs » (v. Florence Chaltiel, « À un an des élections européennes », Rev. UE, 2018, p. 38).La faiblesse de la participation aux élections européennes est révélatrice d’un certain désintérêt et d’une méconnaissance du fonctionnement de l’Union européenne. Ceux-ci trouvent leur racine, très certainement, dans une relative instrumentalisation de l’Union européenne par les gouvernements nationaux, mais aussi dans le fait que les affaires européennes sont très peu présentes dans les médias nationaux (v. Nicolas Moussis). En effet, rares sont les émissions consacrées à l’Union européenne sur les chaines de radio ou de télévision en France. Au contraire, l’actualité européenne n’est très souvent que peu ou mal exploitée par les médias nationaux. Si les réalisations de l’Union européenne sont si peu évoquées par les médias nationaux, c’est « probablement parce qu’elles sont trop techniques, trop détaillées et parfois trop compliquées pour être comprises par le grand public et parfois par les journalistes eux-mêmes » (v. Nicolas Moussis, « L’apathie des citoyens européens : diagnostic et thérapeutique », RMCUE, 2009, p. 522). Il n’existe, par ailleurs, pas de réel média européen. Si Euronews est certes une chaîne pan-européenne et multilingue, son audience reste relativement basse et son accès peu aisé.

La faible présence de l’Union dans les médias est finalement la cause du désintérêt du citoyen pour les affaires européennes mais également son effet. Si les médias n’en parlent pas, les citoyens ne peuvent s’y intéresser, mais comme les citoyens ne s’y intéressent pas, les médias ne sont pas encouragés à en parler. Or cette situation est problématique à deux titres. D’une part, cette méconnaissance de l’Union européenne est une menace pour l’intégration européenne. D’autre part, que l’on soit favorable ou non à la construction européenne, du fait de l’importance des affaires européennes dans notre vie quotidienne, l’information des citoyens est un véritable enjeu démocratique.

 Face à cette visibilité précaire de l’Union dans les médias, les institutions de l’Union sont tentées de communiquer par elles-mêmes. Ainsi, Florence Chaltiel propose qu’« à l’heure du numérique omniprésent, la confection de petites vidéos présentant les travaux du Parlement, ses discussions sur des textes régissant la vie quotidienne des citoyens européens, pourrait donner une visibilité renforcée » (v. Florence Chaltiel, « À un an des élections européennes », Rev. UE 2018. p. 389). Une tentative du Parlement européen a été réalisée sans réel succès (v. par exemple https://www.youtube.com/watch?v=-3LGFgXC_fI)

Par ailleurs, à côté de cette faible visibilité, soulignée et critiquée à de nombreuses reprises, l’Union européenne se retrouve confrontée à un manque de réceptivité du public et à une confusion générale tant à travers la réception de ses messages que dans la manière de les retransmettre. Cela est accentué par la perception de l’Union européenne par les médias des pays membres qui, comme souligné plus haut, diverge. L’exemple du Royaume-Uni est probant notamment au travers de sa presse écrite. Depuis son entrée dans la Communauté économique européenne, en 1973, de nombreux grands titres nationaux anti-européens sont parus, accentués avec la période précédant le Brexit (v. la une du Daily Mail du 22 juin 2016 : « If you believe in Britain vote Leave », ainsi que la une du Sun du 14 juin 2016 : « BeLEAVE in Britain » …). Face à ces campagnes qualifiables de publicité et non d’information, les médias pro-européens nationaux sont restés relativement stoïques (v. https://www.theguardian.com/media/2016/jun/24/mail-sun-uk-brexit-newspapers ).

Une distinction doit dès lors être opérée entre les concepts d’information, de communication et de publicité, souvent amalgamés dans la vie courante. Pour ce qui est de l’information, elle se définit comme « le renseignement possédé et l’action de le communiquer à autrui » (v. Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 11ème édition Quadrige, Paris, janvier 2016, p. 547).  Une communication est le « fait de porter un évènement ou un élément d’information à la connaissance d’une personne déterminée » (v. Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 11ème édition Quadrige, Paris, janvier 2016, p. 209). Une publicité est, quant à elle, « toute communication quelle qu’en soit la forme destinée à promouvoir la fourniture de biens et de services » (v. Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 11ème édition Quadrige, Paris, janvier 2016, p. 832). Une communication est donc un ensemble d’information destiné à une personne donnée, tandis qu’une publicité est composée exclusivement d’informations destinées à la promotion d’un produit ou d’un service. Une citation peut résumer cette distinction : « L’information est libre, la publicité est contrôlée » (v. Bertrand Liard, « La frontière entre information et publicité », Information et produits de santé, quelles perspectives?, sous la direction de Anne Laude et Didier Tabuteau, Collection Droit et Santé, PUF, 2006, p. 49.). L’Union européenne ne doit donc pas faire sa promotion mais une campagne d’information ou encore de communication pour éviter de rencontrer de trop nombreuses critiques. 

A la lumière de ces précisions, il convient de s’interroger sur la question des moyens mobilisables afin de remédier au déficit d’image dont souffre l’Union européenne. Lors de la consultation citoyenne du 26 octobre 2018 (L’Europe vue de l’amphi), il a été émis l’idée de tourner des vidéos informatives, qui seraient diffusées sur les antennes télévisées, à la radio et sur les réseaux sociaux. Néanmoins, la portée de ces campagnes de communication risque d’être amoindrie du fait même de l’auteur dont elles émanent. Le fait pour l’Union de réaliser seule sa propre communication risque d’être contre-productif. Cette initiative pâtirait en amont des critiques faites à l’Union sur sa manière de communiquer. Autrement dit, quelle crédibilité accorder à cette démarche, quand c’est justement l’image de l’Union qui est écornée ? Cela pose un problème de neutralité de la démarche, et nous amène au constat que l’Union européenne ne peut pas parvenir seule à remédier à son déficit d’image.

Au-delà du discours de l’Union européenne, c’est peut-être avant tout le discours sur l’Union européenne qui doit évoluer. Or celui est principalement le fait des diffuseurs d’information au sein des différents Etats membres. Paradoxalement, l’Union se trouve dans la situation où son image dépend plus des acteurs nationaux, que d’elle-même. Le problème n’est pas que l’on ne parle pas de l’Union européenne, mais qu’on n’en parle pas de la meilleure des manières. Ce constat est facilement vérifiable. Dans le contexte actuel marqué par le Brexit ou la montée des nationalismes (v. Hongrie, Pologne, Italie …), l’Union se retrouve au cœur d’une spirale médiatique négative (v. Charlotte Galpin and Hans-Joerg Trenz, The Spiral of Euroscepticism: Media Negativity, Framing and Opposition to the EU, University of Copenhagen), dont la cause en est aussi la conséquence. En effet, les partis extrêmes poussent à mettre l’euroscepticisme à l’agenda médiatique. La présence de ce débat dans les médias sert ensuite à alimenter les discours eurosceptiques, qui simplifient au maximum les réels enjeux de l’Union. Une nécessité de briser ce cercle vicieux se profile alors.

Pour ce faire, il est impératif de réussir à recadrer le débat, trop pollué par les idées reçues, les articles capitalisant sur les peurs des citoyens, ne présentant pas les choses dans leur ensemble. Ces « fausses informations » ou « euromythes » contribuent injustement à la négativité dont souffre l’Union européenne, et deviennent rapidement virales par le biais des médias sociaux (v. interdiction des corgies). L’Union européenne tente d’ailleurs de lutter contre les fake news ainsi que la désinformation (v. Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au comité économique et social européen et au comité des régions, « Lutter contre la désinformation en ligne : une approche européenne », Bruxelles, 26 avr. 2018, COM (2018) 236 final) ou encore la propagande en dehors de ses frontières terrestres (v. East StratCom Task Force), termes connexes mais non synonymes, tant pour le bien-être de ses citoyens que pour la survie d’une perception positive ou, tout du moins, d’une perception sur les scènes nationales.

Ainsi, le rôle des journalistes est primordial et déterminant. Il convient alors de remettre en question l’approche des questions européennes dans médias nationaux. Sur cela, les institutions européennes peuvent avoir un impact. Peut-être devraient-elles tenter de faciliter le travail des journalistes, qui rendent compte de l’état de l’Union européenne. C’est ce que propose notamment la commission Culture et Education du Parlement européen (v. le rapport de 2014, intitulé Communicating ‘Europe’ to its citizens : state of affairs and prospects). Ainsi, plutôt que de vouloir s’adresser directement aux citoyens européens, l’Union européenne devrait sans doute faire progresser l’accès à son information auprès des médias nationaux, pour rééquilibrer le débat à son sujet.

décembre 2018






	

Empêcher la désillusion

Empêcher la désillusion

Estelle Brogniart
Etudiante en Master Droit des Affaires et Fiscalité – Formation continue

Institut de droit et d’économie des affaires – Université Jean Moulin Lyon 3


Je me considère comme issue de la génération Erasmus, l’€ était un bébé pendant mon adolescence, j’ai fait des voyages scolaires (ou non scolaires) chez plusieurs de nos voisins européens avec toujours cette idée d’union, de communion. Peut-être comme un sentiment de pouvoir partager un idéal commun qui puisse tous nous rapprocher.

20 ans ont passé, et j’expliquais à mes enfants le weekend dernier pourquoi nous avons tous ces drapeaux sur le fronton de la mairie de Grenoble.Ils viendront voter avec nous pour les prochaines élections.

Mais c’est la citation suivante d’Albert Camus qui me vient à l’esprit :
 “Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse.”

Et je m’interroge, comment faire pour que l’Europe ne se défasse pas? Comment revenir à cet idéal de ma jeunesse? Tout cela sur fond de Brexit. Comment faire primer l’intérêt collectif de plusieurs nations sur l’intérêt individuel des Etats ? Je n’ai pas de solution, simplement essayer de transmettre à nos enfants les valeurs auxquelles nous croyons et continuer à agir comme nous le pouvons en tant que citoyen.

avril 2019

L’image négative de l’Europe dans la presse

 

L’image négative de l’Europe dans la presse
Emma Pellissard, Alice Tongio et Nicolas Hugonin
Etudiants du Master 2 Droit des affaires et fiscalités-DJCE (année 2018-2019)
Institut de droit et d’économie des affaires – Université Jean Moulin Lyon 3

Le constat

Selon une étude réalisée par Les jeunes européens entre le 17 et le 23 octobre 2018, seulement 3% de la surface de la presse française (soit 102 m2/semaine) est dédié à l’Europe : espace plus que restreint pour décrypter l’actualité européenne pourtant très dense à ce moment-là (Brexit, budget italien, réaction des Etats européens à l’affaire Kagoshi, etc.) (source : http://www.jeunes-europeens.org).
D’autant que les articles sont pour la plupart, succincts : ainsi sur 92 articles référencés,  15 sont des brèves et 36 des articles courts.
Par ailleurs, les articles sont, en grande majorité, rédigés de façon orientée : volonté de faire réagir, de polémiquer plus que d’informer. Par exemple, le journal Le Figaro titrait le 18 octobre 2018 : « Brexit : encore un sommet pour rien ? ».

Les médias d’information contribuent ainsi, en partie, à la spirale de l’euroscepticisme notamment par le manque d’articles et les informations négatives concernant l’Union européenne (UE).

Les sujets les plus évoqués par la presse sont : la sur-réglementation européenne, l’échec de la construction européenne, la volonté de plusieurs Etats membres de sortir de l’UE, la montée du populisme, la crise migratoire. L’UE est souvent dépeinte comme la cause des problèmes, rarement comme la solution possible à ces problèmes.

A la décharge des médias, cette « mauvaise » information est largement due au désintérêt des citoyens pour les problématiques européennes : il y a un travail en amont à faire sur l’attrait de l’Europe et sur la conscience européenne.

Nos propositions

– Conseiller aux journaux et sites internet de créer une rubrique « Europe » au même titre que la rubrique « Sport », « International », « Faits divers », Culture », etc.

– Passer de très courtes publicités à la télévision ou à la radio ayant pour but de donner une information précise sur l’UE ou de contrer un préjugé. Par exemple, spot publicitaire à la radio d’une dizaine de secondes : « Une UE trop bureaucrate ? Préjugé ! L’UE compte en ses institutions bien moins de fonctionnaires que la seule région Île de France ! ».
Nous pensons que de simples informations comme celle-ci peuvent changer les mentalités.
– Création d’une rubrique : « La minute européenne » dans les journaux télévisés avec le même objectif d’informations ludiques, instructives et objectives destinées à mieux appréhender le fonctionnement de l’UE et son utilité.
– Rendre l’actualité européenne plus accessible : un site internet pourrait regrouper toutes les actualités des différentes institutions de l’UE de telle sorte que les médias européens et les citoyens auraient accès de manière simplifiée à l’information.
– Création d’une chaîne européenne disponible en plusieurs langues regroupant l’actualité européenne, les initiatives citoyennes, les projets européens, des rencontres entre citoyens, etc.

novembre 2018

 

L’Europe en questions

L’Europe en questions

Bibiana Burlion
Etudiante en Master Droit des Affaires et Fiscalité – Formation continue

Institut de droit et d’économie des affaires – Université Jean Moulin Lyon 3

 Les élections européennes approchent et le bilan est plus que mitigé.

L’Europe est en crise. La souveraineté de l’Europe est mise à mal. Quels leviers pour la rétablir ?

L’Europe portait des ambitions fortes et communes. Aujourd’hui, nous faisons face à des divisions / divergences de plus en plus profondes (économiques ; migratoires…).

L’intérêt européen ne prévaut plus, c’est l’intérêt national de chaque Etat membre qui semble être mis en avant.

Ne prendre de cette Europe que ce qui peut servir chaque Etat membre, on pense individuel alors qu’il faut penser collectif !

Mais l’intégration d’autant de pays avec des cultures différentes en peu de temps n’a-t-elle pas fragilisé l’Union européenne ?

Comment recréer la confiance, la cohésion ? Une reprise en main par le noyau des pays fondateurs ? Et un retour aux fondamentaux ? 

 

Mars 2019