Les possibles évolution de l’UE liées à la crise sanitaire

Laure LONJON
Etudiante en Master Droit des affaires et fiscalité – Formation continue (2021-2022)

Institut de droit et d’économie des affaires – Université Jean Moulin Lyon 3

A mon sens, l’Europe peut évoluer dans deux sens opposés mais qui, pour autant, seraient tous les deux étroitement liés à la crise de la COVID 19.
– La première hypothèse serait la « nationalisation » : en effet, chaque pays pourrait vouloir se recentrer sur lui-même et vouloir subvenir indépendamment à ses propres besoins pour ne plus avoir à faire face aux problématiques d’import/export et pour se protéger de la propagation de virus ou de variant. Cela pourrait tendre vers une fermeture définitive des frontières.
Chaque Etat membre de l’Union européenne adopterait alors une politique de recentralisation.

– La seconde hypothèse, au contraire, selon l’adage « l’union fait la force », les Etats membres vont vouloir mutualiser les dettes et solliciter l’Europe pour que cette dernière s’investisse dans la relance économique.
Chaque Etat pourra alors demander un soutien et aura la possibilité de profiter des ressources d’un autre Etat membre, comme nous l’avons vu quand l’Allemagne a fait parvenir à la France du matériel afin que la France puisse soigner ses malades.

On sait également que les entités économiques les plus touchées par la crise, comme les commerçants, les restaurateurs ou encore les agriculteurs, auront besoin d’aide pour ne pas sombrer, mais il est fort probable qu’un Etat seul ne soit pas en capacité d’assumer la relance économique.

Alors nous irons vers un accroissement des pouvoirs des institutions européennes et vers une mutualisation des ressources de chaque Etat membre de l’Union européenne.

12 Mars 2021

Je souhaiterais une Europe qui soit…

Priscilla OGIER
Etudiante en Master Droit des affaires et fiscalité – Formation continue (2021-2022)
Institut de droit et d’économie des affaires – Université Jean Moulin Lyon 3

Je souhaiterais une Europe qui soit davantage expliquée et mise en avant, notamment lors des élections de ses représentants. Quel est son rôle précis ? Comment, moi, citoyen européen, puis-je agir sur ses décisions ?

J’aimerais une Europe moins « lourde » administrativement et plus facile à mettre en œuvre et en mouvement, particulièrement dans des situations d’urgence (climat / pandémie) et dans un monde où tout va toujours plus vite.

L’Europe devrait également n’avoir qu’une seule « voix » à l’extérieur. J’entends, par là, qu’elle puisse faire « bloc » en adoptant certaines positions et cela même si le débat « interne » (et il doit exister) a été houleux. Il est indispensable qu’elle puisse faire front de manière efficace et coordonnée ; condition essentielle selon moi pour qu’elle soit entendue dans le monde.

Il m’apparaît crucial de réformer certaines de ses dispositions, d’améliorer son organisation et d’optimiser son fonctionnement. En effet, à l’heure où l’écologie et l’économie représentent des enjeux majeurs, le citoyen ne peut plus comprendre le montant de ses dépenses de fonctionnement ni son organisation sur plusieurs sites géographiques impliquant de nombreux trajets.

Enfin, un petit coup de « jeune » ne lui ferait pas de mal, à la fois en termes de représentation au sein de ses membres, qu’en termes d’image (au sens large) ou de communication.

Oui, il est temps que l’Europe nous (re)donne envie de devenir européen !

11 avril 2021

L’UE : quelques pistes d’amélioration

Nourredine Melliti 
Etudiant en Master Droit des affaires et fiscalité – Formation continue (2021-2022)
Institut de droit et d’économie des affaires – Université Jean Moulin Lyon 3

– L’Union européenne, notre génération l’a vu grandir, nos enfants la vivront pleinement. Ce pourrait être un slogan mais au-delà de la formule si nous voulons que ça devienne une réalité voici mon humble réflexion sur des pistes d’amélioration.

– En effet un ménage et une redistribution des compétences pour une meilleure lisibilité des institutions de l’Union à l’intérieur comme à l’extérieur de l’UE, semblent d’une nécessité absolue.

– Une simplification de son fonctionnement pourrait la rendre plus attractive aux yeux de la nouvelle génération qui pourrait s’impliquer et y adhérer plus facilement.

– Une évolution du mode de scrutin qui s’impose aussi, permettrait d’adopter les textes plus rapidement, de s’éviter d’interminables négociations avec « les minorités de blocage » et une indépendance envers tel ou tel courant de pensée ou influences.

– Suspendre dans un premier temps, le temps de la stabilité politique, sociale, fiscale…l’intégration à l’Union de certains Etats qui, d’un point de vue géopolitique principalement, pourraient y prétendre.

– Une révision des textes afin de contenir toutes velléités de quitter l’Union et s’éviter l’affligeant spectacle du BREXIT.

Avril 2021

 

Mon Europe

Elsa Favette-Brunel
Juriste Corporate
Etudiante en Master Droit des affaires et fiscalité – Formation continue (2021-2022)

Institut de droit et d’économie des affaires – Université Jean Moulin Lyon 3

L’Europe d’aujourd’hui ne me parait pas accessible, tellement loin de mes préoccupations, tellement floue…
C’est une nébuleuse dont je peine à voir les contours.
Je sais bien qu’elle me permet de circuler librement, de payer avec la même monnaie et surtout d’éviter les conflits, les guerres entre les Etats membres et c’est déjà énorme.
Il ne faut pas avoir la mémoire courte, le cauchemar de la deuxième guerre mondiale n’est pas si éloigné. Toutefois, force est de constater que la tendance nationaliste s’étend en Europe.

L’Europe doit réagir et vite.
Je voudrais que l’Europe soit plus proche des préoccupations des citoyens européens et que les Etats membres prennent plus de décisions en concertation ; que certaines décisions ne soient plus du ressort des Etats mais de celui de l’Europe.
Il faut que les parlementaires européens se sentent plus impliqués et investis.
Il serait primordial que les citoyens soient plus informés du mécanisme de l’Europe, et notamment de son mécanisme législatif. La plupart des gens ne savent pas réellement à quoi sert l’Europe, ses institutions, ses élus.
Il faut développer la pédagogie et enseigner plus tôt aux jeunes générations de l’utilité et de la chance d’être européen (développer l’enseignement en primaire, au collège, au lycée).

L’information et la communication ont toujours été les clés d’une meilleure compréhension et d’une implication efficace.

9 Avril 2021

 

Le billet du 22 décembre 2020

Lorsque mes étudiants écrivaient au Président Valéry Giscard d’Estaing

Dès l’annonce du décès de Valéry Giscard d’Estaing (VGE) le 2 décembre 2020, les hommages sont arrivés de toutes parts pour saluer sa mémoire, la presse y a consacré des éditions spéciales, les témoignages ont afflué …les souvenirs aussi.

Mais qu’en disent nos étudiants et étudiantes d’aujourd’hui ?

Ils ont, peut-être, entendu leurs grands-parents parler de VGE, de son septennat (1974-1981), de ses convictions pour l’Europe, des droits accordés aux femmes (droit à l’avortement), aux jeunes (majorité civile à 18 ans et donc droit de vote), des actions menées pour l’égalité professionnelle (Voir notre Tribune), et tant d’autres réformes (pour en savoir plus, ils pourront consulter le site de la Fondation Valéry Giscard d’Estaing).

Ils ont, sans doute, appris dans leur cours de droit européen le rôle qu’a joué VGE pour la construction européenne non seulement lorsqu’il était président de la République, mais également après. A ce propos, je veux évoquer à leur attention une anecdote qui, d’une certaine façon, les concerne parce qu’ils sont étudiants de notre Faculté.

Cette anecdote concerne le projet de Constitution pour l’Europe et la formule « Unie dans la diversité » adoptée comme devise pour l’Union européenne (UE).

C’est en 2000 que cette formule avait été sélectionnée, parmi d’autres propositions, comme devise de l’UE aux côtés d’autres symboles  (drapeau, hymne, etc.), mais elle n’avait pas été intégrée dans les traités européens. En 2003, lorsque VGE présidait les travaux préparatoires au projet de Constitution pour l’Europe, la question d’intégrer les symboles dans le texte et le choix de la devise avait été posée. Sachant que plusieurs réflexions étaient en cours, j’avais invité mes étudiants de maîtrise à faire une ou plusieurs propositions. Ils n’ont pas hésité : ils ont rédigé une lettre ouverte à VGE que je lui ai transmise le 25 mars 2003. Il leur a répondu personnellement, peu de temps après, en les remerciant de leur implication et de leurs intéressantes propositions, mais en les informant que le choix politique avait été de garder « Unie dans la diversité ». Ils n’en ont pas été déçus, l’important pour eux avait été de participer, un peu, aux travaux présidés par VGE. Après tout ce temps, je sais qu’ils en gardent le souvenir. Moi aussi.

Blanche Sousi

 

 

 

Le Billet du Master Droit bancaire et financier du 18 octobre 2019 – Les coulisses du Parlement européen

Rencontre avec l’ex-eurodéputée Françoise Grossetête

À l’invitation de Monsieur Franck Marmoz, Madame Françoise Grossetête, lyonnaise d’origine (elle a fait ses études, comme nous, à la Faculté de droit de Lyon) et eurodéputée (LR-Les Républicains) jusqu’en 2019, est intervenue le 14 octobre dernier devant des étudiants de l’IDEA de Lyon et particulièrement de notre promotion 2019-2020 du Master 2 Droit bancaire et financier.
Riche de 25 années d’expérience au Parlement européen en tant que membre du Parti Populaire Européen, c’est avec passion et enthousiasme qu’elle nous a livré une vision optimiste sur l’avenir de l’Union européenne dans la période de troubles que nous connaissons avec un Brexit à venir, avec ou sans accord.

« L’Union européenne ne sera jamais aboutie », Madame Grossetête nous invite à envisager la construction européenne en gardant en tête cette ligne directrice. L’avenir du continent européen ne peut plus s’envisager sans cette union aujourd’hui ancrée dans l’ensemble de nos systèmes juridiques et politiques.

Ce fut également l’occasion pour l’ex-eurodéputée d’évoquer le rôle des lobbys au sein du Parlement européen. Françoise Grossetête a, au cours de sa carrière, eu à en user pour convaincre sur des projets de législation européenne. « Tout le monde fait du lobbying », en effet pour remonter les contraintes du terrain, il est essentiel de compter sur le rôle des lobbys. Dans la construction d’une législation européenne, le rôle essentiel de l’eurodéputée, nous explique-t-elle, est d’écouter chaque partie prenante pour ensuite se retirer et prendre du recul sur ce qui a été dit de la part de chacun, avant d’adopter une position neutre et juste.

Ce point de vue nous a permis d’envisager les lobbys sous un angle différent de notre vision française souvent peu flatteuse. Néanmoins, Madame Grossetête nous relate quelques anecdotes sur un type de lobbying qu’elle juge pour le moins contestable. Il appartient aux eurodéputés de mettre une distance nécessaire entre des lobbyings douteux et leurs prises de décisions.

Notre interlocutrice a insisté sur la nécessité, même pour un parti ayant un grand nombre de députés, de nouer des alliances avec des députés d’autres partis afin d’obtenir la majorité requise pour faire adopter un texte législatif.

Françoise Grossetête, juriste de formation, s’est souvent vu confier, au cours de sa carrière, le rôle de rapporteur de plusieurs grandes législations médicales. Elle nous explique avoir réussi à convaincre de sa capacité à diriger les discussions européennes dans ce domaine, a priori confiées à des collègues médecins, essentiellement grâce à ce manque de connaissances de la matière qui lui a permis de prendre des décisions impartiales sans être influencée par ses propres idées préconçues.

L’actualité récente sur le rejet de la candidature de Sylvie Goulard à la Commission a également été évoquée lors de cet entretien : derrière des arguments éthiques, c’est une bataille très politique qui s’est jouée.

Madame Grossetête en a profité pour nous dévoiler le climat dans lequel les auditions des futurs commissaires se déroulaient. Ceux-ci sont auditionnés face à des eurodéputés dont l’expérience du Parlement européen est très ancienne et qui, de surcroît, sont hyper-spécialistes des sujets traités. Les eurodéputées abordent les différents sujets dans chaque détail plaçant le candidat dans une situation très déstabilisante.

Une Union européenne fédérale ? « C’est impossible à 28 (ou 27) » nous confie-t-elle. L’idée des pères fondateurs de l’Union européenne semble, aujourd’hui, à exclure. Toutefois, il est évident que l’Union joue un rôle considérable sur une harmonisation des droits de chaque État membre. En effet le nombre de règlement dont l’application est immédiate et de directives conforte cette harmonisation des droits pouvant peut-être aller davantage vers une unification.

Nous tenons à remercier à nouveau chaleureusement Madame Françoise Grossetête pour son intervention enrichissante et son énergie dans le projet européen auquel le Master 2 Droit bancaire et financier est très attaché.

 

La promotion 2019-2020
du Master Droit bancaire et financier
IDEA – Université Jean-Moulin Lyon 3

 

 

 

Quelle gouvernance économique en zone euro?

Quelle gouvernance économique en zone euro ?
Synthèse et propositions suite à une intervention au sein du Collège de Droit

Syriane Le Dantec et Elsa Meyer
Etudiantes en L3 Droit privé –Collège de Droit
Faculté de droit – Université Jean Moulin Lyon 3

 Au sein du Collège de droit en troisième année de licence, nous avons eu une conférence intitulée « Quelle gouvernance économique en zone euro ? » par Charlotte Le Chapelain, maître de conférences en sciences économiques. Cette intervention a été pour beaucoup l’occasion de renforcer voire de découvrir l’influence et les limites des politiques monétaire et budgétaire notamment suite à la crise de 2008. Bien que le propos fût à visée économique, il a été l’occasion de débattre sur des questions d’actualité notamment face aux critiques politiques de la zone euro et son défaut de transparence et de démocratie. 

La conciliation des politiques monétaire et budgétaire s’est trouvée fragilisée suite à l’adoption du Traité de Maastricht en 1992. Dès lors, la politique monétaire a été intégrée parmi les compétences de l’Union européenne. Les Etats ont ainsi abandonné leur souveraineté monétaire et ne peuvent plus, par la même, user de leur monnaie pour combattre différentes crises par l’inflation, l’augmentation ou la diminution des taux de change. Le pouvoir monétaire a été transféré à la Banque centrale européenne (BCE) au sein de la zone euro. La politique budgétaire quant à elle reste une prérogative des Etats membres.

Néanmoins, les Etats ne sont pas totalement maîtres de leur politique budgétaire puisqu’ils doivent respecter les règles de disciplines budgétaires issues du Traité de Maastricht et du Pacte de stabilité et de croissance de 1997. Ces critères de convergence impliquent que les Etats ne doivent pas avoir de déficit public supérieur à 3% du PIB ni de dette publique supérieure à 60% du PIB. Il est intéressant de noter que la justification de ces taux demeure floue, ils ont été mal acceptés. Ces règles empêchent également une politique de relance keynésienne et entrainent des risques d’austérité en cas de crise. En 2013 le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance a instauré une règle d’or budgétaire à valeur constitutionnelle. Cette règle considère que le budget est équilibré si le déficit primaire structurel de l’Etat membre ne dépasse pas -0,5% du PIB lorsque la dette publique excède 60% du PIB. Notons par ailleurs que cette approche des politiques budgétaire et monétaire fonde ce qu’on appelle la doctrine de l’ordo-libéralisme au sein de l’Union européenne. 

Le Conseil d’analyse économique (CAE) a rendu en septembre 2018 une note dans laquelle est développée l’idée que les règles budgétaires ne doivent pas être établies par une formule mathématique sans analyse économique appropriée. D’autant plus que ces règles sont devenues très complexes rendant le cadre budgétaire difficile à intégrer pour les décideurs favorisant in fine leur non-respect. Le CAE recommande ainsi l’introduction d’une règle budgétaire basée sur le taux de croissance des dépenses publiques. Le CAE souhaite la règle suivante : « les dépenses nominales ne devraient pas croître plus rapidement que le PIB potentiel à long terme et plus lentement dans les pays où la dette est excessive. » Finalement l’intégration de cette règle semble plus justifiée et plus cohérente et pourrait même favoriser la démocratie. 

En effet, il semble normal qu’un Etat en période de croissance et de conjoncture favorable soutienne l’économie tout en vérifiant à ne pas laisser courir les déficits. En revanche, l’austérité ne doit pas être toujours la réponse pendant les crises puisqu’elle aggrave les conséquences sociales et politiques. Certaines politiques de relance sont le plus souvent nécessaires afin de relancer l’économie par l’investissement, la consommation, l’augmentation du pouvoir d’achat. Par ailleurs, notre monde est aujourd’hui affecté par de nouveaux défis qui impliquent une réponse urgente. La lutte contre le réchauffement climatique et la politique environnementale nécessitent le bouleversement de certains secteurs économiques ainsi que des investissements. Il semble essentiel pour un Etat de permettre ces dépenses publiques afin de favoriser l’environnement. De plus, l’établissement de cette nouvelle règle, n’étant pas stricte implique un dialogue entre les Etats et la Commission européenne et, dans le même temps, entre l’Etat et leurs citoyens. En effet, les Etats en établissant leur budget ne pourront plus nécessairement justifier leur politique d’austérité par l’obligation de respecter des règles européennes et utiliser l’Union comme bouc-émissaire mais, au contraire, ils devront justifier leurs dépenses en raison de ce que veulent leurs citoyens, ce qui permettrait de favoriser les relations entre l’Union et les citoyens. 

Ensuite, la crise de 2008 a également montré les limites de la BCE dont l’objectif principal est de réduire l’inflation. L’article 123 TFUE (Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne) lui interdit de financer directement un Etat membre, elle ne peut donc pas monétiser un déficit public ce qui a pour risque de priver les Etats membres de marges de manœuvres en cas de crise. Puisque les Etats ne pouvaient se financer auprès de la BCE et que l’augmentation des impôts aurait mal été supportée politiquement, il ne restait plus que la possibilité d’emprunter. Mais le risque de faillite inquiète les investisseurs et a conduit à la crise des dettes souveraines par l’envolée des taux d’intérêt directeur. 

Cette réalité pose la question de la vulnérabilité de notre dette et de l’impact des marchés financiers, souvent étrangers, sur nos politiques et les citoyens. Notre dette est détenue majoritairement à l’étranger. Les investisseurs se fient aux agences de notation pour évaluer de manière non transparente et non démocratique la solvabilité de l’Etat. Face à leur perte de confiance évaluée sur des mécanismes comptables et informatique, l’Etat est contraint de réagir par l’austérité n’ayant pas d’autres réponses.

C’est alors que l’Union a joué un rôle de caution pour rétablir la confiance. La BCE a réagi en diminuant les taux d’intérêt, ils sont à 0% depuis 2016 et Mario Draghi (le Président de la BCE) a récemment annoncé qu’ils n’augmenteront pas avant 2020. Mais c’est surtout en outrepassant ses mandats que la BCE va soutenir les Etats menacés de faillite. En effet, dès 2010 elle va directement monétiser la dette par un programme de rachat des titres de dette publique sur les marchés obligatoires secondaires. En 2012 un second programme de rachat est annoncé pour un montant illimité, la simple énonciation de ce programme a suffi pour arrêter la spéculation sur les marchés. En 2015 et 2016, la BCE a utilisé l’instrument quantitative easing en rachetant des obligations souveraines et des titres privés tout en inondant les banques de liquidités (60 milliards puis 80 milliards d’euros) afin de relancer l’économie.

Des mécanismes de solidarité ont été développés afin de soutenir les Etats et d’enrayer la spirale de spéculation des marchés financiers ; alors même que le Traité de Maastricht interdit la solidarité. Ainsi, le Fonds Européen de Stabilité Financière, le Mécanisme Européen de Stabilité Financière puis le Mécanisme Européen de Stabilité ont été créés dans l’urgence afin de permettre à certains Etats comme l’Irlande, le Portugal et la Grèce de se financer à des taux d’intérêt raisonnables. Ces fonds sont alimentés en fonction des richesses des Etats membres, ainsi, l’Allemagne et la France sont les plus gros contributeurs.

Le fait que la Banque centrale européenne ait dû outrepasser ses mandats est significatif des limites du modèle de l’ordo-libéralisme en cas de crise économique. Ces limites sont aussi présentes concernant la politique budgétaire et l’exigence du respect des critères de discipline budgétaire en cas de crise. En effet, cette exigence a pour conséquences qu’en cas de dépassement du déficit public autorisé en vertu de ces critères, et sous peine d’être sanctionné par l’Union européenne, l’Etat ne peut répondre que par une politique d’austérité, comme on le voit actuellement en Grèce. C’est dans ce type d’hypothèses que l’on voit véritablement l’impact direct de la politique budgétaire sur la société et sur les citoyens européens. Se pose alors nécessairement la question de l’adhésion de ces citoyens à ces politiques décidées au niveau de l’Union européenne.

S’interroger sur la vision qu’ont les citoyens des institutions européennes et de leurs politiques amène à la question de la légitimité de ces institutions aux yeux des citoyens. En effet, on peut relever ici l’une des critiques majeures faites à l’Union européenne et au fonctionnement de ses institutions : le manque de légitimité démocratique. C’est le cas notamment de la Banque centrale européenne, caractérisée justement par son indépendance. Pourtant, comme nous l’avons vu, certaines politiques adoptées par l’Union européenne, telles que la politique budgétaire, ont un impact réel sur les sociétés. Aussi, cette ambivalence entre d’un côté des politiques fortes adoptées, et de l’autre un sentiment de non-participation des citoyens à ces projets, peut expliquer en partie le rejet de plus en plus fort de l’Union européenne. Et c’est actuellement l’un des défis auquel doit se confronter l’Union européenne, à savoir comment intégrer davantage les citoyens dans le processus décisionnel.

Ce sentiment de déficit démocratique a pu avoir comme conséquences pour les citoyens d’envisager différemment leur rapport à la Nation, et à la souveraineté étatique. Cela a notamment pour effet la montée des nationalismes et des mouvements populistes en Europe récemment. En effet, actuellement, il y a un véritable questionnement sur le rôle et les pouvoirs de l’Etat, et sur la marge de manœuvre dont il dispose pour agir politiquement, au sein de l’Union européenne. A ce titre, la gouvernance économique de l’Union européenne, et notamment la politique budgétaire, soulèvent des questions intéressantes : doit-on laisser l’Etat maître de sa politique budgétaire, afin qu’il puisse l’ajuster aux circonstances nationales? Doit-on au contraire restreindre les marges de manœuvre des Etats dans le but d’une harmonisation européenne ? L’harmonisation européenne n’est-elle réalisable que par le modèle de l’ordo-libéralisme ? Il faut bien comprendre que l’ordolibéralisme est un parti pris de la part de l’Union européenne, ayant ses avantages et inconvénients, et qui témoigne d’une certaine vision de l’Europe et des Etats qui en sont membres. Ainsi, penser la gouvernance économique de l’Union européenne revient à définir une certaine Europe.

Or, on voit aujourd’hui de nouvelles alternatives émerger et proposer une nouvelle vision de l’Europe. Différentes propositions ont pu émerger notamment le système des Eurobonds qui permettrait d’emprunter à un taux d’intérêt unique au niveau européen pour les 19 Etats de la zone euro. Mais cette proposition a été rejetée car jugée trop fédéraliste. On retrouve encore la création d’un Parlement de la zone euro et d’un budget de la zone euro. Cette solution pourrait pallier le déficit démocratique de la zone euro et faire face aux critiques de complexité et de technocratie bruxelloise. Ainsi, le Parlement déciderait du budget de la zone euro, pourrait entraîner une harmonisation fiscale et sociale et conduire à l’objectif de taux unique d’impôt sur les sociétés. Les décisions proviendraient de la représentation nationale et non uniquement des chefs de gouvernement et de ministres des Finances. Cette impulsion démocratique ne peut être que saluée.

Finalement trois visions peuvent se dégager, certains proposent, comme par exemple le parti La République En Marche, une plus grande intégration européenne, s’approchant davantage du modèle fédéral. A l’inverse, d’autres revendiquent une plus grande souveraineté étatique, accompagnée d’une attitude plus protectionniste. Une autre voie, médiane, consisterait à conserver le modèle de l’ordo-libéralisme, tout en le rendant plus souple, et en permettant aux Etats de ne pas avoir à respecter les critères de convergence dans certaines circonstances.
Toutefois, quelle que soit la voie choisie, la gouvernance économique de l’Union européenne sera un véritable enjeu dans la définition d’une nouvelle Europe.

Mai 2019

Le billet du 9 mai 2019

Un certain 9 mai, la déclaration Schuman

Le 25 mars dernier, en ouvrant la semaine de l’Europe organisée par la Faculté de Droit de l’Université Lyon 3, le Doyen Hervé de Gaudemar indiquait aux nombreux étudiants et invités présents dans l’amphi, qu’il commençait toujours ses cours sur l’Europe en évoquant la déclaration Schuman du 9 mai 1950… moi aussi !

Ce texte qui donna naissance à la CECA (Communauté européenne du charbon et de l’acier) est, en effet, considéré comme le texte fondateur de la construction européenne. On rappelle que Robert Schuman, alors Ministre français des affaires étrangères, a fait cette déclaration dans le salon de l’Horloge du Quai d’Orsay à Paris, lors d’une conférence de presse en présence de nombreux journalistes. Ce fut un évènement qui eut un grand retentissement. 

Aujourd’hui à l’approche des élections européennes, comment ne pas l’évoquer encore ? Car ce texte, largement inspiré par Jean Monnet, permet de comprendre qu’à cette époque et pour régler certains problèmes, l’Europe était une nécessité, mais aussi pourquoi, à notre époque, elle l’est toujours : certes, les  problèmes ne sont plus tout à fait les mêmes (climat, sécurité, environnement, concurrence économique mondiale, taxation des géants du numérique etc.), mais la nécessité de les traiter au plan européen demeure. 

Si comme moi, vous voulez relire (ou lire) intégralement ce texte, et même écouter et voir Robert Schuman le prononcer lors de ce moment historique… Cela est possible grâce aux travaux de numérisation effectués par le CVCE (Centre virtuel sur la connaissance de l’Europe), travaux désormais archivés par l’Université du Luxembourg. Pour y accéder directement : divers documents Déclaration Schuman.

Vous y trouverez aussi les différentes versions du projet, des caricatures et diverses réactions à la suite de cette conférence de presse, etc.  Bref une plongée dans l’histoire européenne propice à la réflexion.

Encore un mot : le présent billet est évidemment daté du 9 mai. On sait que chaque année à cette date, c’est la Journée de l’Europe pour marquer l’anniversaire de la déclaration Schuman. Chaque Etat la célèbre comme il le souhaite. Le Luxembourg vient d’en faire un jour férié.

On sait peut-être moins que la première Journée de l’Europe fut organisée le 9 mai 1986, conformément à la décision du Conseil européen qui s’était tenu à Milan les 28 et 29 juin 1985 et qui approuvait, ainsi, une proposition du Comité sur l’Europe des citoyens, dit Comité Adonnino. Encore une plongée dans l’histoire européenne pour nourrir l’avenir.

                                                                                                        Blanche Sousi

Le billet du 8 avril 2019

L’Europe : du rêve à la raison

Nous entendons ou lisons souvent, ici ou là, que l’Europe ne fait plus rêver !
Evidemment : comment pourrait-il en être autrement ?

– Pour ceux qui ont vécu ses premiers pas, l’Europe est devenue une réalité sur laquelle ils portent un regard aussi lucide que constructif : trop de réglementations dans tels domaines, pas assez dans d’autres (climat, environnement…), trop de disparités fiscales nationales empêchant une saine concurrence au sein de l’Union européenne, absolue nécessité de présenter un front uni face à certaines puissances économiques du monde, etc.  L’heure n’est plus au rêve mais à la raison.

– Quant aux plus jeunes, l’Europe fait tellement partie de leur quotidien, mais à leur insu, qu’ils n’en voient pas les bienfaits, même les plus évidents : par exemple, pouvoir circuler d’un Etat à l’autre sans visa et sans connaître les files d’attentes aux frontières, c’est normal ; pouvoir voyager dans différents Etats avec une même monnaie, l’euro, c’est normal ; pouvoir utiliser son smartphone à travers l’Europe sans frais supplémentaires, c’est encore normal !

La liste est longue de tout ce que l’Europe a fait et continue de faire pour nous, beaucoup plus longue qu’on peut l’imaginer.  

Pour en prendre la mesure, rien n’est plus facile : il suffit d’aller sur Ce que l’Europe fait pour moi.
Grâce à ce site très pédagogique (élaboré par le service de la recherche du Parlement européen), chaque citoyen qu’il soit étudiant, enseignant, salarié, retraité… (de n’importe quel Etat membre), peut connaître les actions et réalisations de l’Union européenne, concernant sa vie, sa région, son travail, ses activités, ses loisirs, ses voyages… Une multitude d’informations pour tous ceux qui ont le souci d’avoir des informations de première main à l’abri des  « fake news », ces fausses informations qui trompent et manipulent l’opinion publique et que certains internautes relayent sans toujours savoir qu’ils se rendent complices de ces manipulations.

En complément de ce site, on pourra consulter Les décodeurs de l’Europe, document établi par la Représentation en France de la Commission européenne : là encore, il s’agit d’un outil précieux pour répondre aux fausses allégations concernant l’Union européenne.

L’Europe nous concerne tous et toutes, que nous le voulions ou pas. A quelques semaines des élections au Parlement européen, il importe de mieux la connaître et la comprendre pour voter en citoyen averti. Il y va de l’avenir des jeunes générations.

                                                                                             Blanche Sousi

L’éducation des enfants

L’éducation des enfants
Bettina Helbert
Etudiante en Master Droit des Affaires et Fiscalité – Formation continue
Institut de droit et d’économie des affaires – Université Lyon 3

Les enfants apprennent l’anglais en maternelle et même pour certains, l’espagnol en primaire, mais ils ne connaissent pas l’Europe. Ceci est une aberration. Ils entendent parler de l’Europe sans trop savoir ce qu’il en est, ce qu’elle apporte et ce qu’ils pourront lui apporter.

Pour que l’Europe vive, qu’elle soit connue et reconnue, et qu’ils en soient de futurs acteurs, il faut qu’elle soit ancrée dans leur culture. Pour ce faire, il faudrait leur en parler jeune et ne pas attendre l’université. En parler à l’école en primaire et au collège, leur raconter l’Europe, les raisons de création (la paix, Churchill), les raisons de son évolution, les bienfaits, son fonctionnement, les intéresser, les impliquer dès leur jeune âge.

Il faudrait donc que des “délégués de l’Europe” ou les professeurs des écoles soient formés pour en discuter avec eux, leur parler de son histoire, de ce que cela à apporter aux pays membres afin qu’ils soient des Européens au même titre que des Français.


Novembre 2018